Plainte du Procureur général

1er aout 1996




COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
DE POINTE-A-PITRE
PARQUET

Pointe-à-Pitre, le 01 Août 1996







LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

A

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL
PRES LA COUR D'APPEL
DE BASSE-TERRE


OBJET : Recrudescence des appendicectomies au sein de la population de la DESIRADE.

N° Parquet : 96005442



Faisant suite à mon appel téléphonique de ce jour, j'ai l'honneur de vous confirmer les éléments d'information suivants : à la suite de la recrudescence soudaine et particulièrement importante du nombre d'appendicectomies pratiquées au sein la population de la DESIRADE , les autorités sanitaires ont diligenté diverses investigations afin d'appréhender ce phénomène.

Diverses analyses ont été effectuées pour s'assurer de la qualité de l'eau ( certaine "et notamment le médecin généraliste de l'île soutenant que cette "épidémie" trouverait son origine dans une contamination de l'eau fournie par le réseau de distribution), alors que parallèlement était menée une investigation épidémiologique.

Il convient de relever tout d'abord, que les diverses analyses efféctuées écartent toute hypothèse de contamination de l'eau dont la qualité est parfaitement satisfaisante

Du rapport établi au terme de cette étude épidémiologique , il ressort que le nombre de cas recensés d'appendicectomies entre Avril 1995 et Juillet 1996 est de 220 (ce qui représente 13,7% de la population).

Dans 91% des cas , les personnes ont consulté le médecin de l'ile, quatre ayant consulté à la Polyclinique du Morne Jolivière ; il convient de préciser que sur les 220 cas recensés , 199 ont été opérés au sein de cette Polyclinique vers laquelle , semble-t-il , le médecin généraliste dirigeait systématiquement les patients .

Après étude des dossiers médicaux, il ressort que seule une minorité des personnes interrogées lors de l'enquéte ont déclare das symptômes "compatibles" avec un tableau clinique da syndrome appendiculaire aigu. Par ailleurs l'examen anatomo-pathologique effectué à l'hôpital NECKER à PARIS sur un échantillon de 53 cas à abouti à un seul diagnostic d'appendicite aiguë et quatre cas probables.

Ainsi , les auteurs du rapport peuvent conclure que le nombre de résultats positifs ast largement inférieur au nombre de patients appendicectomisés.

En outre , les autres examens pratiqués permettent d'écarter l'hypothèse d'affections aiguës d'origine infectieuse ou parasitaire ; de même une contamination bactérienne anormalement élevée ne peut être , non plus, retenue .

Au terme de ce rapport , il est établi qu'il existe que quelques cas d'appendicite aiguë , l'hypothèse d'une épidémie d'appendicites aigués ne pouvant , conformément à l'état des connaissances médicales actuelles , être retenue .

Par contre est mise en évidence l'exitence de troubles du transit chronique à type de constipation dans la population,pouvant expliquer les Symptômes présentés ( et qui pourraient trouver leur origine dans la nature de l'alimentation.....).

En ce qui concerne les conditions dans lesquelles les interventions chirurgicales ont été pratiquées , il convient de souligner le délai extrêmement court entre l'admission à la Polyclinique et l'opération : ce délai est inférieur à 24 heûres dans 30% des cas et inférieur à 48 heures dans 71% des cas .

Dans un grand nombre de cas , les sujets auraient été opérés rapidement , avant même l'obtention dés résultats des examens habituellement pratiqués .



Les conclusions de ce rapport (qui porte sur l'examen de la totalité des cas) pouvant expliquer ce nombre important d'appendicectomies pratiquées, alors que seules quelques cas d'appendicites aigües sont mis en évidence .

L'hypothèse d'une erreur médicale (erreur de diagnostic....) pourraît être retenue .

Cependant , le nombre de cas d'"erreurs" (200 environ) (sauf à envisager un manque de compétence particulièrement alarmant ....) , les conditions dans lesquelles ces interventions chirurgicales ont été effectuées (précipitation , quasi-totalité, 90%, ayant été pratiquée au sein du même établissement , la Polyclinique de Pointe-à-Pitre et semble-t-il par le même chirurgien ....) m'ont amené à ouvrir une information du chef de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente . Je ne manquerai pas de vous tenir informer des suÎtes de cette procédure .

P/LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE


Y. CALVET
Substitut



Pièce jointe : Rapport des Docteurs QUENEL et INFUSO