Défense devant le Conseil Régional
de l'Ordre des Médecins

Docteur Manuceau




Docteur Jérôme MANUCEAU
Chirurgie Générale et Vasculaire
Chirurgie Coelioscopique

CENTRE D'AFFAIRES DE BERGEVIN
97 110 Pointe - à - Pitre
Tel : 05 90 90 16 18 Fax : 05 90 91 86 62

à Docteur R. ARISTIDE
Pointe - à - Pitre, le 6 décembre 96


O B J E T : Réponse à la plainte de Mme NIEGER.

Cher Confrère,


Suite à votre demande et ce, pour assurer ma défense dans le cadre de la plainte de Mme NIEGER à mon égard, je vous adresse mes remarques.


1/ LES CRITÈRES D'INDICATION OPÉRATOIRE POUR L'APPENDICECTOMIE

Je vous rappelle qu'il n'existe aucun examen para-clinique spécifique de l'appendicite aiguë. Le diagnostic est essentiellement clinique. Henri MONDOR dans son livre

DIAGNOSTICS URGENTS ABDOMEN
6ème Édition Masson et F. Roth ;
disait en 1947, je cite "Extrait":

(page 55)
"On devrait apprendre à dire "les appendicites" et non pas "I'appendicite" car c'est pour cette lésion, mieux que pour toute autre, que convient la formule : il n'y a pas une maladie, mais des malades. S'attendre à un tableau toujours semblable à lui-même et s'en tenir à un schéma clinique, c'est se condamner à être souvent aveugle..."
"Celui qui en resterait à la description de la "crise aiguë" typique n'aurait rien appris des innombrables pièges de la maladie la plus déroutante qui soit..."
"Les lésions dépassent parfois de bien loin ce qu'un tableau clinique paisible laissait croire une forme bénigne. et inversement, des débuts à grands fracas peuvent être des flambées éphémères..."

(page 56)
"La crise aiguë est d'avenir imprévisible : les plus instruits ont été souvent trompés et les abstentionnistes ont perdu plus de malades que les opérateurs du premier jour : c'est un fait certain. 7e rappellerai seulement l'exemple d'un malade cité par Legueu. Il est vu pour une appendicite d'apparence légère. On décide d'attendre. Les signes s'amendent au point de faire croire la guérison certaine. Le malade se lève, quitte l'hôpital. Au bout de sept à huit jours, il est pris de phénomènes graves et meurt en vingt-quatre heures, de péritonite diffuse..."
"...appeler l'attention sur les bénéfices incontestables et incontestés de l'opération précoce, pratiquée dans les vingt-quatre premières heures de la crise, et sur les dangers non moins incontestables, mais encore contestés de la thérapeutique d'attente..."

(page 57)
"Toute crise d'appendicite, si bénin qu'en paraisse le début peut soudain se transformer en la plus grave des appendicites. Il n'y a pas de traitement médical de l'appendicite aiguë. Le meilleur traitement est l'opération dans les vingt-quatre premières heures de la crise..."

(page 150)
"De l'ombilic au fond du Douglas, d'une épine iliaque à l'autre, l'appendice peut être partout.."

Et on constate que sur les 120 pages écrites sur l'appendicite aiguë dans cet ouvrage, seuls deux concernent le cas typique qui a été pris comme référence par les épidémiologistes.

Dans l'article extrait de la Revue "le Concours Médical" que vous a présenté le Docteur MAZILLE, pensant me contredire, il est dit :

(page 62)
Devant une douleur aiguë de la fosse iliaque droite, les éléments qui lorsqu'ils sont associés, permettent de surseoir à l'appendicectomie sont : l'absence de réaction pariétale à la palpation abdominale, et l'absence de température supérieure ou égale à 38°C et l'absence d'hyperleucocytose supérieure à 10 000 éléments par micro litre"

Non seulement, elle ne sait pas s'il y avait ou non de réaction pariétale à la palpation abdominale puisqu'elle n'a jamais examiné un malade, mais elle oublie de lire la suite

"Un nouvel examen clinique est souhaitable dans les six à douze heures suivantes. Cette surveillance permet d'évaluer l'évolution des signes cliniques et de poser une éventuelle indication opératoire"

Elle a aussi omis de lire

(page 59)
"La distinction entre l'appendicite et les douleurs abdominales non spécifiées est souvent difficile. La présentation clinique de l'appendicite n'est que rarement classique, aboutissant souvent à un doute diagnostique. Le diagnostic d'appendicite doit être suffisamment précoce pour éviter l'évolution vers la perforation. La crainte de la perforation aboutit à un taux élevé de laparotomies, avec le plus souvent un taux élevé d'appendices sains réséqués... entre 20 et 3O% pour sept études..."

(page 74)
"Devant une douleur abdominale aiguë chez l'enfant, il faut penser à une urgence chirurgicale et en premier lieu à une appendicite aiguë, avec pour conséquence la réalisation d'une appendicectomie dans les meilleurs délais"

Je vous fais remarquer comme il est dit ci-dessus, qu'en France tout le monde est d'accord sur le fait qu'une suspicion d'appendicite doit être prise en charge par un milieu chirurgical et non médical.

(page 72)
"L'examen anatomo-pathologique est indispensable, quelque soit l'aspect macroscopique de l'appendice. I1 permet de découvrir des lésions bénignes (parasitose, tuberculose, maladie de Crohn ...) ou malignes (carcinoïdes, adéno- carcinomes) qui nécessitent des investigations et un traitement complémentaire éventuels"

Or en Guadeloupe, je suis un des rares chirurgiens à demander l'histologie de tous les appendices enlevés. Cette année j'ai découvert deux carcinoïdes (dont un chez les Désiradiens) et un adénocarcinome. Voici les statistiques des histologies des Désiradiens.

Mme Nieger, les deux épidémiologistes, (les Docteurs INFUSO et QUÉNEL) ainsi que le Docteur MAZILLE croient naïvement que l'absence de fièvre, de troubles du transit, d'hyperleucocytose et de VS accélérée est incompatible avec une appendicite aiguë : voici un cas typique que j'ai rencontré chez les Désiradiens et qu'on retrouve très souvent en Guadeloupe.
Il s'agit de Mr F. R., opéré le qui présentait des douleurs isolées de la FID depuis plusieurs semaines, le bilan biologique était normal, en dehors d'une leuconeutropénie prononcée ; sous coelioscopie les lésions macroscopiques étaient graves (confirmées par le Docteur BACHELIER présente à l'intervention). Et l'histologie concluait à : une appendicite aiguë nécrosante avec de très importants phénomènes hémorragiques. Réaction péritonéale et petits foyers hémorragique du méso.

Voici ce que rencontre très souvent les gynécologues devant des douleurs pelviennes chroniques qui ne font pas leur preuve : un appendice malade (voir l'article de gynécologie : The appendix as the cause of chronic lower abdominal pain par FAYEZ, TOY et FLANAGAN, Am J. OBSTET Gynécol 1995 Vol 172 n°1).


2/ LA CRITIQUE PRINCIPALE DU PROFESSEUR STROBEL

"L'épidémiologie nous apprend en effet que l'appendicite est infiniment moins prévalante dans les pays en développement à faible niveau d'hygiène hydrique et forte transmission de germes hydrophiles, que dans les pays développés à hygiène et contrôle sanitaire satisfaisants"
C'est absurde de dire cela. Comment voulez vous que l'on puisse parler d'épidémiologie des appendicites dans les pays du tiers monde, quand on sait que la mortalité y est élevée et que personne ne fait d'autopsies pour savoir de quoi meurent ces gens ?
Il faut comparer ce qui est comparable. L'appendicite est une pathologie reconnue avec précision que dans les pays riches. Dans ces pays, il est vrai que l'on a jamais constaté d'épidémie d'appendicites. Mais dans lequel de ces pays peut-on distribuer pendant un an une eau comme celle distribuée aux Désiradiens sans déclencher une révolution ? Même en Guadeloupe, il commence a y avoir des remous devant la qualité de l'eau. Pourtant elle est très supérieure à celle de la Désirade.

L'argument qui consiste à croire qu'un phénomène non encore observé ne peut pas exister n'est pas très sérieux. Qui aurait pu prévoir la catastrophe "du sang contaminé ", celle "de la vache folle", celle de "amiante" ou celle du virus "Ebola" ? Quels ouvrages de référence en parlaient ? Est-ce le Harrison ou les traités de Médecine du Professeur STROBEL?

Le Professeur Ph. HARTEMANN, spécialiste d'Hygiène et de Santé Publique à l'Université Henri Poincaré de Nancy et membre du RNSP, à qui j'ai envoyé un dossier concernant la Désirade, a un langage beaucoup plus subtil que celui du Professeur STROBEL, quand il dit :

"Les recherches du RNSP ne permettent pas de retrouver d'étiologie pouvant expliquer une épidémie, tant dans la répartition spatio-temporelle que dans les analyses biologiques ou anatomo-pathologiques; le dossier n'est pas clos et d'éventuels autres micro-organismes pourraient peut-être faire I 'objet d'investigations à condition d'en avoir les moyens financiers nécessaires"...
"Quant aux résultats des analyses d'eau effectuées par l'Institut Pasteur qu'à mon avis il ne faut pas mettre en cause, et en admettant qu'ils aient porté sur des échantillons représentatifs, ils ne sont en rien décisifs puisque les paramètres recherchés sont ceux du contrôle sanitaire de routine. Celui-ci repose sur la recherche de micro-organismes indicateurs et non sur celle de pathogènes. Tout le monde sait que l'on peut retrouver des pathogènes dans une eau dite conforme, aux normes de potabilité et ce dans certaines circonstances dont je ne sait si elles ont été réunies à ce moment. On ne peut trouver que ce que l'on recherche et à ma connaissance les analyses effectuées en période "critique" ne permettent d'écarter aucune hypothèse. Rappelons à titre d'exemple, l'épidémie de MILLWAUKEE d'origine hydrique à Cryptosporidium aux USA en 1993 avec 400 000 cas et une eau conforme aux normes de potabilité"

Pourtant en écrivant ces mots, il ne savait pas encore que les trois prélèvements fait sur la Désirade le 19 avril 96, (seuls prélèvements faits de décembre 95 à juin 96) étaient qualifiés par l'Institut Pasteur : "Eau non potable chimiquement et biologiquement". Évidemment, les résultats de ces prélèvements sont restés secrets et n'ont fait l'objet d'aucun communiqué de la DDASS, ni d'aucune nouvelle analyse de contrôle immédiate.


3/ LES CRITIQUES DE MADAME NIEGER

ARTICLE 6 :
Mme NIEGER ne semble pas savoir que tous les médecins ont des correspondants préférentiels dans les différentes spécialités qu'ils conseillent à leurs patients quand ces derniers n'en connaissent pas. Or j'étais le correspondant du Docteur DUPONT pour la chirurgie viscérale. En prenant sa suite, le Docteur LE CABELLEC a continué tout naturellement à m'envoyer ses patients.
Madame NIEGER affirme que j'ai opéré 199 désiradiens sur 220. Les épidémiologistes ont décomptés dans leur rapport 226 cas. Monsieur SIDEL du SRPJ m'a affirmé que la liste des patients que la DDASS lui a transmise allait du 1er août 95 au 11 juillet 96 inclus. Au cours de cette période, j'ai opéré exactement 187 patients. Il y a donc 39 patients opérés par d'autres chirurgiens. Cela me fait 85 % des cas et non 96 % comme l'affirment les épidémiologistes dans leur rapport.

ARTICLE 8 :
Il s'agit du diagnostic d'appendicites. Les deux épidémiologistes, le Docteur MAZILLE et Madame NIEGER croient savoir que les malades que j'ai opéré ne présentaient pas les signes d'appendicite aiguë. Ils ne savent pas que l'élément essentiel du diagnostic de l'appendicite est la palpation du ventre.
Ils me reprochent de n'avoir pas fait appel au Professeur STROBEL pour établir le diagnostic d'appendicite :
* d'une part, je dois dire que je n'ai jamais eu de doute sur le diagnostic d'appendicite et que si j'en avais eu un, c'est à un chirurgien que je me serais adressé et non au Professeur STROBEL qui est dermatologue et infectiologue spécialiste du SIDA. Et vous, en tant que médecin, quand vous avez une suspicion d'appendicite, à qui vous adressez vous pour en avoir la confirmation ? Est ce au Professeur STROBEL ou à un chirurgien ?
* d'autre part, j'étais conforté dans mes indications, d'autant plus qu'opérant sous coelioscopie, je voyais des lésions macroscopiques importantes qui étaient confirmées par l'histologie. Ces lésions ont été vues aussi par les anesthésistes qui ont témoignés (Docteurs LAISNÉ et EULALIE).
En fait le problème qui se posait au Docteur LE CABELLEC et à moi-même n'était pas celui du diagnostic mais celui de l'étiologie. C'est à cette fin que le Docteur LE CABELLEC a alerté la DDASS depuis octobre 95 et ne s'est jamais arrêté de la faire. Pour ma part, j'ai pratiqué un grand nombre d'examens, à but étiologique : sérologie de Yersiniose, de bilharziose, mise en culture des appendices, coproculture et parasitologie des selles...
Je n'ai jamais refusé de collaborer. J'avais proposé aux médecins de la DDASS et aux deux épidémiologistes de venir interroger et examiner mes malades. Ils ont refusé.
Me reprocher d'avoir opéré un malade d'appendicite après qu'un collègue du CHU ai diagnostiqué un problème médical, est ridicule. Par contre cette situation s'est produite non seulement pour des appendicites mais aussi pour des GEU et des occlusions. Je ne m'en suis jamais vanté car tout le monde peut se tromper, y compris moi-même. Quand à l'enfant B., elle a été renvoyée du CHU avec le diagnostic de rhume et elle a été opérée quelques jours après d'appendicite à la Clinique Saint-Joseph. Devant la persistance des douleurs, les parents me l'on amené. Elle présentait une maladie de la jonction de l'uretère droit.

ARTICLES 13 et 20 :
Je me suis adressé aux médias de façon polémique qu'à partir d'août 96, après que la DDASS ait entrepris une campagne extraordinaire de diffamation contre le Docteur LE CABELLEC et moi-même. Cette campagne a été commencée par Madame NIEGER dès le 9 Avril 96, poursuivie par le Docteur MAZILLE le 6 juin 96 et couronnée par le communiqué du Préfet le 30 juillet 96. Ces calomnies reprises et amplifiées par tous les médias et plus particulièrement par RFO ont eu comme conséquence la perte de la presque totalité de mes correspondants ainsi que les trois-quarts de ma clientèle. Le 11 août le Docteur LE CABELLEC était poignardé après une campagne de plusieurs mois d'intimidation ( menaces de mort par appels téléphoniques anonymes) et deux tentatives d'assassinat par les deux sabotages de sa voiture.
J'avais acquis la certitude que l'eau était la cause de ces appendicites à partir de la fin juin (je m'expliquerai sur ce point plus loin), que la DDASS s'était moquée de toute un population pendant dix mois et qu'elle nous avait désigné, le Docteur LE CABELLEC et moi-même comme les bouc émissaires. Dans ces conditions, comment pouvais me taire ? On ne m'avait pas laissé le choix. En me taisant je reconnaissais implicitement ma culpabilité et me rendais complice de la DDASS.

ARTICLE 35 : Madame NIEGER ne sait pas que les sérologies VIH sont faites systématiquement dans les services de chirurgie au même titre que la NFS, le TP ou le TCK. Et cela bien entendu, dans le souci de protéger le personnel soignant (infirmières, anesthésistes, chirurgiens) qui est très souvent en contact avec le sang des malades.
Les personnes qui ont accès aux dossiers des malades sont tenues au secret professionnel. Ces analyses ne sont pas faites en cachette des patients et les résultats leurs sont remis en main propre.
Mme NIEGER a t-elle une seule plainte à ce sujet ?

ARTICLE 45 :
Tous les patients qui sont vus à mon cabinet ont une fiche d'hospitalisation qui comporte les renseignements administratifs, les antécédents médicaux et chirurgicaux ainsi que l'indication opératoire et le type d'intervention. A partir de janvier 96, les patients de la Désirade allaient directement à la polyclinique où je les examinais. En effet, je les considérais comme des victimes et je voulais réduire au maximum leurs frais de déplacement et leur éviter d'avancer les honoraires de la consultation. Le courrier du Docteur LE CABELLEC contenait l'historique de la maladie et les signes cliniques motivant l'hospitalisation. Si j'étais d'accord avec son diagnostic, je n'ajoutais rien. Les antécédents étaient notés par l'anesthésiste. Par contre, le protocole opératoire comporte toujours, l'indication opératoire. Ainsi dans les dossiers on peut retrouver tous les éléments essentiels sur la pathologie, l'indication opératoire, l'intervention et l'histologie. Évidemment il n'y avait pas dans mes dossiers, le brillant questionnaire imaginé par nos éminents épidémiologistes, dont le seul soucis était de prouver qu'il n'y avait pas d'appendicite. Mais au fait, que contiennent les dossiers des 39 désiradiens opérés par les autres chirurgiens ?
Il est à noter que la DDASS n' a saisi que le tiers de mes dossiers et qu'elle veut faire croire qu'elle les possède tous .
Mme NIEGER semble très soucieuse de la qualité des soins que j'ai prodigué aux désiradiens. Je tiens à lui faire savoir que depuis 1992 où j'ai commencé la coelioscopie, je me rend quatre fois par an à mes frais, dans les plus grands centres de Coeliochirurgie où j'effectue des stages de perfectionnement.
En outre, sur les 196 Désiradiens que j'ai opéré, je n'ai eu aucune complication contrairement à toutes les équipes de coeliochirurgie. Elle sait parfaitement que les patients sont sortis de la Polyclinique le lendemain de l'intervention ou le surlendemain dans leur immense majorité. La qualité de la chirurgie ne se juge pas à la longueur du dossier mais à la qualité des suites opératoires. Les infirmières Majors des deux services de chirurgie peuvent attester que j'ai vu à la polyclinique tous mes malades, tous les jours de la semaine, y compris les dimanches et les jours fériés.
Je suis fier d'avoir pu offrir à cette population sinistrée, les techniques les plus modernes, sans avoir jamais pris un seul francs de leurs mains.


4/ REPROCHES CONTRE LA DDASS

Alors que la DDASS a été alertée par le Dr LE CABELLEC dès octobre 95, elle ne s'est vraiment intéressée à l'affaire que dix mois plus tard (en juin 96). A partir de là, la seule personne qui a cherché véritablement la cause des appendicites a été le Docteur DELACROIX médecin inspecteur de la DDASS. Elle voulait créer une commission de scientifiques indépendants, comprenant entre autre le Professeur STROBEL et le Docteur GOURSAUD (Directeur de l'Institut Pasteur). Pour Madame NIEGER, le Docteur DELACROIX a eu le tort de ne pas exclure à priori le problème de l'eau. Elle fut très vite écartée.
Des moyens importants ont été mis en place par la DDASS pour démontrer une seule chose :
la collusion des deux médecins pour établir une "terreur" sur la Désirade et opérer tous les habitants.
Madame NIEGER oublie quelques petits détails : pendant les premiers mois, c'était essentiellement les enfants qui étaient touchés ; la pathologie principale était les douleurs abdominales qui concernaient plusieurs centaines de personnes et non les appendicectomies, ainsi que les pathologies associées : allergies cutanées, et problèmes génito-urinaires chez les femmes et les fillettes.
En fait, la conviction de Madame NIEGER, du Docteur MAZILLE et des deux épidémiologistes était faite dès le début avril 96. Cette conviction était basée sur deux arguments - L'absence d'épidémie d'appendicite dans la littérature épidémiologique (donc ils pensaient que ce phénomène ne peut pas exister à la Désirade).
-Le fait que la majorité des patients m'étaient adressés (ils ont cru que c'était la preuve d'une pratique de dichotomie).
Une troisième idée à priori a régi leur conduite : en aucun cas l'eau ne peut être mise en cause, malgré les mauvais résultats concernant les analyses chimiques et bactériologiques de cette dernières.
La première chose demandée par les épidémiologistes a été de changer de chirurgien et d'histologiste. L'appel au Professeur STROBEL qui est de notoriété publique, un proche du Docteur MAZILLE, permettait de donner une apparence "raisonnable" à un détournement de clientèle et "aurait permis de démasquer de faux diagnostics".
Ainsi l'enquête des deux épidémiologistes était sur des rails. Ils n'ont retenu que les faits qui pouvaient nous mettre en cause et ont écartés tout ce qui pouvait nous disculper :
* ils excluent les 39 malades opérés par d'autres chirurgiens ;
* ils n'ont pas tenu compte des histologies qui avaient été faites par le Docteur TRIVAL ;
* ils ont refusé de faire relire la totalité des lames d'histologie ;
* pour l'eau, ils n'ont présenté que les examens microbiologiques d'octobre, novembre et décembre 95 et les examens chimiques de juillet 96, faits par Paris. Ils ont oubliés de présenter l'examen biochimique de décembre 95 qui montrait un pH au dessus de la norme et surtout le seul examen fait entre décembre 95 et juin 96, celui du 19 avril 96 qui pour les trois prélèvements concluait : eau non potable. Cela s'appelle une dissimulation de preuves. Il s'agit d'une très grave faute professionnelle ;
* ils ont refusé de prendre en compte les témoignages des habitants concernant l'eau et de croire que les vers qu'ils leur avaient montrés sortaient de leurs robinets ;
* ils ont refusé de constater la vétusté du château. Pourtant un huissier que nous avons envoyé à deux reprises à nos frais, a constaté sa non conformité ;
* ils ont cru le maire qui affirmait que chaque année au mois de septembre, il faisait nettoyer le réservoir, sans qu'il n'ait eu besoin de produire un quelconque justificatif, ce que les épidémiologistes reconnaissent dans leur rapport (page 75):
"71 n'existe pas de procédure écrite au sein de la SOGEA, ni registre d'entretien au niveau de la commune qui permettent à la DDASS de juger de la régularité de l'entretien" au mépris des habitants qui leur affirmaient que depuis 20 ans, jamais l'eau n' a été coupée en dehors de la rupture de canalisation survenue en septembre 95, par le cyclone LUIS (Cf. attestation Monsieur R. Fernand résidant à côté du réservoir) : comment peut-on nettoyer un château sans couper l'eau ?

J'accuse Madame NIEGER d'avoir orchestré une diffamation indirecte contre le Docteur LE CABELLEC et moi-même à partir d'avril 96. Cette diffamation a été mise au devant des médias et constamment alimentée par le Docteur MAZILLE, les épidémiologistes, le Préfet et même le secrétaire d'État à la Santé Publique Monsieur Hervé GAYMARD qui a repris à son compte les conclusions des épidémiologistes en septembre 96 (communiqué RFO radio)

J'accuse Madame NIEGER d'avoir permis une situation scandaleuse où les prélèvements des échantillons d'eau étaient faits par la femme du maire, la DDASS l'affirme dans son rapport alors que le maire le réfute (Cf. Sept Mag du 5 septembre 96), lui-même agent de la SOGEA, membre du SIAEAG et conseiller général. A ce propos le Professeur HARTEMANN à écrit :
"Sans prendre position sur l'origine éventuelle du phénomène, je ne peux que regretter à titre personnel que l'on puisse avoir une situation ou l'ensemble des pouvoirs, y compris le contrôle sanitaire, soit réunit au sein d'une même famille travaillant par ailleurs pour un groupe privé de distribution d'eau et de service
C'est une situation que je dénonce depuis de nombreuses années, avec un succès mitigé, en particulier au niveau du contrôle sanitaire dont les laboratoires sont menacés d'intégrations au sein de ces groupes. On ne peut être à la fois juge et partie, mais j'ai eu longtemps l'impression de mener un combat perdu d'avance... jusqu'à ce que certaines affaires politico-financières récentes ne lui redonnent une nouvelle crédibilité. N'oublions pas que la maladie de la vache folle en Grande Bretagne est partiellement un sous-produit de la privatisation des services vétérinaires rattachés aux grands groupes agro-alimentaires dont les intérêts à court terme ne sont pas toujours ceux de la transparence et de mesures préventives désagréables et coûteuses".
On comprend aussi pourquoi le Préfet Monsieur Michel DIEFENBACHER qui connaissait la vérité par l'intermédiaire des RG, s'est appliqué à la dissimuler lorsqu'on découvre que son frère, Monsieur Jean-Louis DIEFENBACHER est le directeur des Affaires Internationales de la compagnie Générale des Eaux (CGE) maison mère de la SOGEA.
Madame NIEGER ou certains de ses collaborateurs ne reculent devant aucun mensonge quand ils prétendent dans leur rapport:
"Arrêt des appendicectomies lors du remplacement du Docteur LE CABELLEC par un confrère " (rapport DDASS, page 32).
En fait, l'épidémie s'est arrêtée fin juin 96 lorsque le Docteur LE CABELLEC a demandé aux désiradiens de ne plus boire l'eau sans l'avoir fait bouillir au préalable. Juin: 70 opérés ; juillet : 9 opérés ;
à partir d'août : 1 opéré par mois.

"Ces problèmes de santé ne concernent que les désiradiens".
Cette information est exacte et m'a été donnée par les inspecteurs des RG.

"Pas de personne malade recensée après un séjour à la Désirade"
Le Docteur GUDUFF m'a signalé que deux de ses patients ont été opérés d'appendicite après des vacances passées à la Désirade. Le Docteur LE CABELLEC m'a signalé 6 cas:
J. Marguerite (opérée le 6/02/96)
D. S. D. P. Rosé (opérée le 18/04/96)
L. Aymeric (opéré le 10/06/96)
D. Lucas (opéré le 13/06/96)
R. Marga (opérée le 14/06/96)
N. Rosale, non répertoriée car habitant au Moule (opérée à la Clinique St Joseph).


5/ PROUVER L'IMPLICATION DE L'EAU DANS L'ÉPIDÉMIE

a) Chronologie de "l'épidémie"
Cette épidémie commence progressivement en septembre. Elle s'arrête brutalement après une croissance exponentielle, fin juin avec l'arrêt de la consommation de l'eau.

b) La répartition géographique des appendicites.
Les chiffres donnés par les épidémiologistes sont faux. Ci-joint la liste des opérés avec leur lieu de résidence. On constate que parmi les 4 opérés des Galets, tous buvaient de l'eau en provenance du réservoir dans la journée
V. Estelle - Bourg
D. A. Yann - Bourg
P. Fred (Plombier) - toute l'île principalement à Baie-Mahault
R. Jacques (école) - Bourg

Ainsi 0% d'opérés parmi les habitants des Galets, vivant aux Galets.
Les autres pourcentages sont:
Les Sables : 6,4%
Désert : 16, 6%
Bourg : 12 %
Souffleur : 17%
Baie-Mahault : 17%
Le pourcentage des Sables est faible car presque toutes les maisons ont des citernes.

c) La mauvaise qualité de l'eau
- Les témoignages des désiradiens sont innombrables et formels. La présence de vers, l'odeur putride, la couleur, les réactions cutanées chez certains.
- Lorsqu'on étudie la totalité des analyses on est scandalisé par le comportement de la DDASS : passer sous silence et ignorer les mauvais résultats de l'eau
- Lorsqu'on étudie la totalité des analyses d'eau fournie par la DDASS, on constate qu'en 1995 seuls 38 % des échantillons montraient une eau potable sur le plan chimique et bactériologique. En 1996, ce taux est de 41 %.
- Rappelons qu'en plein drame, entre décembre 95 et juin 96, seuls trois prélèvements on été fait le 19 avril 96 dont les analyses concluaient à une eau non notable.
- Le communiqué de la DDASS publié dans Sept Magazine e 14 Novembre 96 dit :
"Qu'il a été réalisé une série de 8 prélèvements le 25 octobre. Il affirme que l'eau distribuée est globalement de bonne qualité bactériologique, comme en témoignent par ailleurs les précédentes campagnes d'analyses effectuées en février et août 96. Toutefois une analyse de la série effectuée sur l'eau prélevée au robinet d'un usager avant le réservoir indique une légère contamination de l'eau en ce point par des streptocoques fécaux"
Or, Si l'on regarde de près, les 8 prélèvements, on s'aperçoit que 2 sont non potables (aux Galets et un au Bourg). Quand à l'affirmation que les précédentes campagnes n'ont révélé, aucun problème bactériologique est curieusement contredite par les analyses qui m'ont été remises et dont nous avons déjà parlé.
Est-il normal que Madame NIEGER mente aussi effrontément?
- J'ai fait analyser le dépôt de l'une des bouteilles de l'eau de vidange du château du 12 août 96. Le résultat est édifiant. Il a été trouvé du Plomb et du zinc en très grosse quantité.


6/ RAPPORT DES ÉPIDÉMIOLOGISTES

Docteur INFUSO et Docteur QUESNEL sont des médecins qui n'ont jamais pratiqué la médecine. Des appendicites, ils ne savent que ce qu'ils ont lu dans leurs cours : autrement dit, presque rien.
L'épidémiologie est une application des statistiques. La formation des épidémiologistes se fait en une année scolaire à raison de deux heures hebdomadaires, au cours desquelles, on vous apprend à utiliser certaines formules des statistiques.
En ce qui me concerne, je suis mathématicien, spécialiste des Statistiques Médicales. Je pense être infiniment plus qualifié que les deux épidémiologistes aussi bien sur le sujet des appendicites que sur celui de l'épidémiologie. Le Docteur LE CABELLEC a vérifié toutes les adresses, j'ai dû reprendre tous les calculs, refaire les pourcentages, étudier toutes les analyses de l'eau.
Le constat est navrant: ce rapport il a été construit dans I' unique but de prouver notre culpabilité. C'est un rapport partial et orienté.


7) MES RAPPORTS AVEC LE DOCTEUR LE CABELLEC

J'ai fait sa connaissance le dimanche 21 Juillet 96, date à laquelle je me suis rendu pour la première fois sur l'île de la Désirade. Je voulais voir et comprendre ce qui se passait sur place. Entre autre, il m'a fait visiter le "château d'eau" dans lequel nous sommes entrés. La deuxième fois que je l'ai vu c'était le 11 août 96 à 23 heures aux urgences du CHU où il est arrivé en hélicoptère, transpercé de part en part par un poignard de 40 cm de long.


CONCLUSION

Monsieur F. Loïc Joseph âgé de 33 ans est décédé brutalement le 18 août 96 à Goyave en Guadeloupe à la suite de douleurs abdominales épisodiques mise sous le compte des "gaz". L'autopsie faite au CHU, a révélé qu'il s'agissait d'une péritonite appendiculaire. Ainsi en 1996, des gens meurent encore d'appendicite.
J'ai consacré exclusivement mes quinze jours de vacances en septembre dernier à transmettre des dossiers concernant la Désirade, à Monsieur le Président de la République, à Monsieur le premier Ministre ainsi qu'à tous les grands Ministères, dans lesquels nous demandions (le Docteur LE CABELLEC et moi-même) , qu'une enquête soit faite par l'Inspection Générale et le Comité d'Éthique Médical.
Nous nous sommes heurtés à un refus net et sans appel. de la part de Monsieur Hervé GAYMARD, Secrétaire d'État à la Santé et à la Sécurité Sociale qui a repris à son compte les conclusions des épidémiologistes.

Notre dernier recours c'est vous

Nous vous demandons de reconnaître que nous n'avons jamais failli dans cette affaire à notre sermon d'Hippocrate.
Nous vous demandons de venir au secours des désiradiens, en nommant une commission d'enquête qui pourra dans un premier temps établir la vérité (en particulier en faisant expertiser la totalité des lames histologiques) et tenter de comprendre ce phénomène unique au monde :
234 appendicectomies en un an sur une population de 1600 habitants, alors que l'année précédente, il y en a eu moins de 10.
Le coût pour la Sécurité Sociale s'est élèvé à 2 milliards de centimes. L 'île de la Désirade sinistrée a vu disparaître complètement le tourisme.
Devant ce désastre, les mots que j'employais pour conclure l'article de Sept Magazine du 5 septembre 96, me paraissent plus que jamais à l'ordre du jour

En ce qui me concerne, jamais je n'abandonnerai les désiradiens, tant que les coupables ne seront pas reconnus officiellement. Même si la bataille semble perdue d'avance contre une administration puissante comme la DDASS, aveugle, incompétente et menteuse, complice des intérêts privés de la SOGEA et tout cela couvert par un Préfet plus soucieux d'éviter les remous que de mettre à jour un scandale dont est victime une population simple et sans défense.